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08
Jan

La vaccination anti Covid-19 : contribution éthico-scientifique (FR/EN)

La pandémie dûe au coronavirus SRAS-CoV-2 signalée pour la première fois à Wuhan en décembre 2019, a traversé le monde à une vitesse sans précédent avec de profondes répercussions sanitaires mais aussi socio-économiques. Elle mobilise les scientifiques de tous les continents pour trouver une réponse médicamenteuse et vaccinale afin d’enrayer sa redoutable progression. Certes plus d’un siècle après la pandémie de grippe espagnole (1918), la pire pandémie de l’histoire de l’humanité, nous sommes toujours à la recherche d’un vaccin universel contre la grippe (Paules 2017). À défaut d’une solution universelle (pan-coronavirus), une réponse vaccinale adaptée s’impose dans des délais rapides tout en garantissant des conditions optimales d’efficacité et d’innocuité. La pandémie Covid-19 a permis en 2020 une mobilisation mondiale sans précédent de la recherche et des moyens alloués, sources de nouvelles connaissances virologiques et immunitaires, d’innovation et de sauts technologiques contrastant avec une communication souvent tapageuse et dénuée d’information scientifique vraie et accessible au grand public.

La vaccination anti Covid-19 : contribution éthico-scientifique

La pandémie dûe au coronavirus SRAS-CoV-2 signalée pour la première fois à Wuhan en décembre 2019, a traversé le monde à une vitesse sans précédent avec de profondes répercussions sanitaires mais aussi socio-économiques. Elle mobilise les scientifiques de tous les continents pour trouver une réponse médicamenteuse et vaccinale afin d’enrayer sa redoutable progression. Certes plus d’un siècle après la pandémie de grippe espagnole (1918), la pire pandémie de l’histoire de l’humanité, nous sommes toujours à la recherche d’un vaccin universel contre la grippe (Paules 2017). À défaut d’une solution universelle (pan-coronavirus), une réponse vaccinale adaptée s’impose dans des délais rapides tout en garantissant des conditions optimales d’efficacité et d’innocuité. La pandémie Covid-19 a permis en 2020 une mobilisation mondiale sans précédent de la recherche et des moyens alloués, sources de nouvelles connaissances virologiques et immunitaires, d’innovation et de sauts technologiques contrastant avec une communication souvent tapageuse et dénuée d’information scientifique vraie et accessible au grand public.


Sommaire

Acquis 2020 et questions sans réponse certaine sur la pandémie Covid19

Les différents vaccins annoncés

La vaccination et ses stratégies

Les principes éthiques en jeu

Conclusion


Acquis 2020 et questions sans réponse certaine sur la pandémie Covid19

Une santé publique efficace pour contrôler la pandémie doit se fonder sur une compréhension scientifique du virus et de la virose, au fur et à mesure de ses avancées formellement publiées dans des revues de référence.

 

  • le SARS-Cov-2

Il s’agit, depuis deux décennies, du 3e bêta-Coronavirus franchissant la barrière inter espèces (animal–homme) pour une transmission d’homme à homme, après le SRAS CoV (2002–2003) en Chine et le MERS-Cov (2012) au Moyen-Orient. Une caractéristique commune de la virulence de ces 3 coronavirus est de se répliquer dans les voies respiratoires inférieures de l’homme à l’origine de pneumonie et dans les cas les plus graves d’un syndrome de détresse respiratoire aiguë (SRARS). Le SARS-Cov2 est hautement contagieux, se propageant par inhalation des aérosols respiratoires ainsi que par contact humain direct et indirect (surfaces et objets contaminés). Des analyses récentes démontrent que la protéine S de pointe (spike) du SRAS-Cov2 se lie au récepteur cellulaire ACE2 pour pénétrer par endocytose, la cellule hôte. Cette liaison est 10 à 20 fois plus élevée pour le SRAS-Cov2 que pour le SRAS CoV, expliquant en partie la plus forte infectiosité et la pathogénicité accrue du premier par rapport au second (Hoffmann 2020). Des mécanismes moléculaires complexes autour du récepteur ACE2 éclairent aujourd’hui le pouvoir pathogène du virus et le développement potentiel d’agents thérapeutiques et vaccinaux. L’ARN viral peut subir des mutations ponctuelles mineures de dérive antigénique mais aussi majeures par modification de segments du génome viral entre les souches humaines et animales à l’origine de changements antigéniques susceptibles d’échapper à l’immunité collective existante particulièrement dans le cas de pandémie grippale. Ce pouvoir mutagène majeur n’a pas semblé concerner jusqu’en 2020,  les coronavirus : le SRAS-CoV ne s’est pas reproduit depuis 2004. Cependant la mutation G614 semble augmenter l’infectiosité du SRARS-CoV2 (Korber 2020) dont la circulation semble peu dépendante de facteurs saisonniers. Une telle caractéristique biologique du SRARS-CoV2 mérite d’être rapidement élucidée compte-tenu de la résurgence de nouveaux cas et de la perspective de la virose type Covid 19 en continu pour les années à venir. Il est intéressant de rappeler que le RO (taux de contamination initiale du virus dans une population non encore vaccinée ni immunisée) du SRARS-CoV2 présente une fourchette de valeurs significativement plus élevées par rapport à celui de la grippe espagnole : 2-3 vs 0,9-2,1.

 

Pour les initiés

Le virus SRARS-CoV2 contient 16 protéines non structurelles aux nombreuses fonctions telles que réplication du génome, le clivage de l’ARN messager de l’hôte, le réarrangement des membranes, le déclenchement de l’autophagie, la méthylation, le déroulement du double ARN… Il contient 4 protéines structurelles : la protéine Spike « spiculée » (S), celles de la nucléocapside (N), l’enveloppe (E), la membrane (M). La protéine S joue un rôle vital pour l’attachement du virus et son entrée dans la cellule hôte. Elles se compose de 2 sous unités S1 et S2. La sous-unité S1 a 2 domaines fonctionnels : n-terminal (NTD) et liaison des récepteurs (RBD) alors que la sous-unité S2 en a 3 : peptide de fusion (FP) et deux régions de répétition heptad, motifs répétitifs de 7 acides aminés (HR1 et HR2). L’alignement du trimère protéique S1 sur la tige trimérique S2 forme la protéine S immuno-dominante (Jiang 2020). Une sérine 2 protéase (TMPRSS2) est responsable de l’amorçage initial de la protéine Spike transmembranaire de la cellule hôte pour initier l’entrée du virus avec l’aide de métalloprotéases. La TMPRSS2 est responsable du clivage de la protéine S exposant la région FP pour l’entrée endosomale du virus dans la cellule hôte. L’inhibition de cette protéase pourrait présenter un intérêt thérapeutique, de même tout ou partie (RBD) de la protéine S pour la fabrication de vaccins protéiques anti Covid-19. Comme pour la protéine S, les 3 autres protéines structurelles présentent des mécanismes moléculaires susceptibles d’être utilisés comme cibles thérapeutiques, médicamenteuse ou vaccinale. (Gralinski 2020 – Yoshimoto 2020)

 

  • la maladie Covid-19

L’hypothèse de départ selon laquelle la Covid-19 n’est qu’une simple maladie infectieuse est aujourd’hui abandonnée. Depuis le premier rebond épidémique, il est suggéré qu’il peut y avoir différentes phases dans la même maladie. La maladie virale correspond à la phase 1 dominée par une infection précoce d’une durée de 8 jours. En cas de non-résolution, elle peut chronologiquement évoluer vers 3 autres phases distinctes, de gravité croissante. La phase 2 est pulmonaire, justifiant une hospitalisation, la phase 3 associe à l’atteinte pulmonaire, un syndrome hyper inflammatoire pouvant conduire au syndrome de détresse respiratoire aiguë (ARDS) avec parfois d’autres manifestations systémiques d’organes telles que des manifestations neurologiques dans plus d’un tiers des cas, la phase 4 se complique de troubles vasculaires et thrombotiques (CIVD) pouvant endommager différents organes (reins, myocarde, foie, cerveau)

Par ailleurs il semble acquis que l’âge avancé (biologique plus que chronologique sauf après 80 ans), le genre masculin et l’hospitalisation pour une Covid-19 sévère sont des facteurs contribuant à de plus grandes réactions antivirales contre le SRAS-CoV-2.

 

  • les traitements

Chaque phase de la maladie relève d’un traitement et d’une prise en charge appropriés qui pourrait se résumer ainsi :

  • phase 1: traitement symptomatique de l’infection avec prise d’antiviraux précoces d’efficacité prouvée au moins sur d’autres virus y compris coronavirus et en l’absence de contre-indications, notamment cardio-vasculaire
  • phase 2: hospitalisation avec évaluation de l’atteinte pulmonaire, oxygénothérapie et surveillance de l’hypoxie, ventilation non invasive et en cas de détérioration, intubation et ventilation mécanique (Mahase 2020). Le recours à des traitements s’opposant à la production de cytokines tels que l’interleukine 6 fait l’objet d’essais randomisés en cours notamment sur les antagonistes des récepteurs d’IL-6 (tocilizumab)
  • phase 3 (pulmonaire et inflammatoire) : elle consiste en la prise en charge du syndrome de détresse respiratoire aiguë selon qu’il est léger, modéré ou sévère mais aussi à des traitements comme les corticostéroïdes susceptibles de moduler la réponse immunitaire excessive (Mammen 2020). Certaines équipes ont recours au plasma de patients convalescents et en bonne santé d’une infection à SRARS-CoV2 (Shen 2020).
  • phase 4 (CIVD) : la phase 3 peut se compliquer par des phénomènes thrombotiques évoqués par une augmentation du D-dimère dans le sérum et justifiant un traitement anticoagulant par héparine. Le recours à l’héparine de bas poids moléculaire (HBPM) au début de la phase 3 semble réduire le risque de mortalité à 7 jours de 48 % et à 28 jours de 37 % (Thachil 2020).

Chaque phase de la maladie Covid-19 justifie un traitement adapté. Ainsi, les antiviraux ne sont pas indiqués dans les phases 3 et 4 et la thérapie anti-inflammatoire immunosuppressive est contre-indiquée dans les phases 1 et 2. Une attention particulière sur l’interaction médicamenteuse et la polymédicamentation sera portée à l’égard des personnes âgées, fragilisées par la comorbidité et l’immuno-sénescence.

Le plus grand nombre de questions sans encore de réponse concerne la dimension immunitaire de la pathologie Covid-19 et ses conséquences en matière médicamenteuse et surtout vaccinale.

Considérant que le SRAS-CoV-2 est un coronavirus nouveau sans réponse immunitaire antérieure, toute la population (>80%) est sensible à l’immunité de groupe même si la mémoire immunitaire et/ou la réactivité croisée avec d’autres coronavirus sont toujours possibles. La question de savoir si ces dernières offrent une protection suffisante anti Covid-19 est aujourd’hui sans réponse. Tout parallèle sur les durées de protection secondaires à l’infection Covid-19 et à la vaccination anti Covid-19 est impossible en l’état de la connaissance.

Les mécanismes de régulation de la tempête de cytokines restent encore à élucider pour mieux favoriser vaccins et antiviraux efficaces susceptibles de prévenir ou d’améliorer l’immunopathologie induite (fig 1).

 

  • la réponse immunitaire à la Covid-19, naturelle et vaccinale

Côté Anticorps (immunité humorale)

La corrélation du seuil du titre des anticorps anti-SRAS-CoV-2 avec la protection clinique n’est pas encore déterminée et soulève pour certains auteurs des questions sur l’efficacité protectrice de ces réponses aux anticorps parfois mises à mal par des anticorps facilitants lors d’un phénomène appelé « amélioration anticorps dépendante » (ADE) (Arvin 2020). Il s’agit de l’utilisation détournée d’anticorps par certains virus ou certains vaccins ; le complexe virus-anticorps peut utiliser la voie du complément ou modifier la protéine de l’enveloppe virale et aggraver, par ce biais, la charge virale et la maladie. Ce fut le cas dans les essais cliniques et précliniques de candidats vaccins contre le SRAS-CoV. Cependant l’utilisation thérapeutique du plasma de convalescents à récupération rapide de la Covid-19 suggère des résultats prometteurs d’immunité passive dans les premiers essais cliniques. Le recours à de tels anticorps semble être une voie thérapeutique d’intérêt particulièrement pour la phase en 2 pulmonaire hyper inflammatoire afin de contrer l’hypersécrétion de cytokines et ses conséquences. La durée de vie de ces anticorps (environ 6 mois) pourrait également s’intégrer dans une stratégie pré-vaccinale, dans l’attente d’une disponibilité du vaccin anti Covid-19.

Les vaccins de virus inactivé ainsi que les vaccins protéiques induisent la seule immunité humorale avec production d’anticorps spécifiques. Au contraire, les vaccins à acide nucléique (ARN, ADN) en produisant « de façon naturelle » la protéine spécifique, engage non seulement l’immunité humorale mais aussi l’immunité cellulaire.

 

Côté immunité à médiation cellulaire

Les lymphocytes T jouent un rôle majeur dans la protection immunitaire adaptative et la vaccination en favorisant la production d’anticorps neutralisants le virus, l’élimination directe du virus et la mémoire immunitaire. La durée de la persistance des cellules T à mémoire spécifique pour le SRAS-CoV-2 (CD4+ et CD8+) n’est pas encore établie contrairement au SRAS-CoV (Ng 2016). Toutes les réponses aux cellules T ne sont pas bénéfiques. C’est par exemple le cas décrit de l’activation aberrante de cellules T CD8+ induisant des dommages cardiaques (Zhang 2020). C’est aussi l’intervention de l’immunité innée qui renforce bénéfiquement l’immunité cellulaire mais qui aussi, par un excès de production d’interféron, peut précipiter et aggraver une tempête à cytokines jusqu’à empêcher la mort et l’élimination des cellules infectées.

Mécanismes de l’immunité naturelle et vaccinale contre la Covid-19
Fig. 1 : mécanismes de l’immunité naturelle et vaccinale contre la Covid-19

La question légitime est de savoir si le vaccin contre la Covid-19 peut augmenter le risque de formes graves de la maladie (phase 3 et 4). La réponse se pose pour tous nouveaux vaccins. Comme le montre la fig 1, une immunité préexistante à certaines infections (cellules mémoires B et T) peut favoriser des formes graves d’une part du fait de la production d’anticorps préexistants qui facilitent l’infection des cellules de l’immunité (dendritiques, macrophages) et/ou qui amplifient la réaction inflammatoire délétère à cytokines. Si les études précliniques ont pu le démontrer pour le SARS-CoV et le MERS-Cov, ce n’est pas le cas pour le SARS-CoV-2 tant sur les modèles animaux que sur les essais cliniques vaccinaux en cours de phase 4. On ne peut pas aujourd’hui répondre à la question complémentaire du risque de la vaccination d’une personne ayant présenté la Covid-19 de façon symptomatique ou asymptomatique. Trop peu de personnes à sérologie positive ont été incluses dans les essais de phase 3 et 4 pour les vaccins à ARN de Pfizer et de Moderna. En France, la HAS (Haute Autorité de Santé) ne prévoit pas à ce jour leur vaccination systématique mais l’autorise à celles et ceux qui le souhaitent. Un délai de 90 jours est recommandé pour vacciner les personnes ayant présenté une forme aiguë de la Covid-19. La vaccination semble induire une immunité comparable à celle acquise lors des formes sévères de l’infection naturelle dont les anticorps sont détectables au moins pendant 6 mois. Nous n’avons pas aujourd’hui de réponse d’immunité vaccinale au-delà de 6 mois. Il en est de même à propos de la protection contre la Covid-19 asymptomatique puisque la recherche d’anticorps dans les essais cliniques de phase 3 n’a été systématisée qu’en cas de symptômes.

 

Les différents vaccins annoncés

Ce recensement de décembre 2020 n’est pas exhaustif. Il correspond à un instantané de données disponibles où manquent encore cruellement des publications scientifiques (en dehors des vaccins de Pfizer-BioNtech et de Moderna-NIH), ne serait-ce qu’intermédiaires sur l’efficacité et l’innocuité des vaccins en cours d’évaluation de phase 3. Le journal New York Times recense le 5 décembre 2020, 58 vaccins en cours d’essai sur l’homme et au moins 86 vaccins en phase préclinique sur l’animal.

L’effervescence d’une course aux vaccins pour enrayer la pandémie mondiale de la Covid-19 exige, comme pour toute thérapie, une succession d’étapes avant l’autorisation gouvernementale de mise sur le marché. Il s’agit chronologiquement de la phase préclinique sur l’animal (souris transgénique, hamster, macaque), de la phase 1 testant l’innocuité et la réponse immunitaire sur un petit nombre de volontaires, la phase 2 élargit l’évaluation à des centaines d’individus selon des groupes définis tels que l’âge (enfants, adultes, personnes âgées), la phase 3 s’étend à des milliers de personnes volontaires dont une partie reçoit un placebo pour tester l’efficacité protectrice du vaccin et éventuellement révéler de rares effets secondaires qui auraient pu passer inaperçus dans les phases précédentes. La phase 4 est vaccinale, mesurant l’impact de son utilisation sur la protection individuelle et collective ainsi que sur l’épidémiologie de la Covid-19. Elle fait suite à l’autorisation de mise sur le marché (approval des Anglo-Saxons).

La rapidité des délais d’obtention de vaccins capables d’une réponse immunitaire contre la protéine S s’explique par les connaissances acquises lors des deux précédentes épidémies à coronavirus, celle du SARS Cov (2003) et celle du MERS-CoV (2012) et l’effort scientifique sans précédent pour cette pandémie. Elle a permis de développer la production d’ARNm synthétique correspondant à la séquence de la protéine S publiée dès janvier 2020 mais aussi de lancer dans des délais plus longs, la culture virale et la production de protéines d’intérêt pour d’autres types de vaccins. Force est de constater également la grande facilité d’obtenir une réponse immunitaire efficace contre le SARS-CoV-2 contrairement au VIH sans vaccin malgré les recherches menées depuis près de 20 ans.

L’industrie du vaccin fait appel au soutien financier de fonds privés mais aussi publics, gouvernementaux pour entreprendre ses recherches. De même, la logistique de la production vaccinale repose sur les commandes faites en amont (en millions de doses) par les états sous réserve de leur approbation réglementaire, indiscutable par des organismes comme la FDA (US) et l’agence européenne du médicament (EMA).

Les légitimes annonces-marketing pour les raisons ci-dessus énoncées ne sauraient être confondues avec les preuves scientifiques attendues dans des revues de référence. Comme nous le verrons, des raccourcis inhabituels entre les phases, notamment la phase 3 et l’autorisation définitive de mise sur le marché sont accordées par certains pays au prétexte de l’urgence vaccinale (US, UK, Chine, Russie). Ces raccourcis représentent un gain de temps précieux sur les procédures habituelles, en accélérant les processus de vérification des vaccins (FDA – EMA) par un raccourcissement des délais administratifs d’analyse des données (à 15 jours pour la Rolling Review). Dans le cas contraire, ils pourraient soulever quelques questions d’ordre éthique, d’une vaccination « trop précoce » notamment pour les groupes prioritaires les plus vulnérables. Il va de soi que des essais d’innocuité pour les groupes à risque incluant les enfants relevant de la pédiatrie, les femmes enceintes, les patients « immuno-compromis » et les personnes de sénescence avancée, devraient pouvoir être validés avant l’extension de la vaccination à ces groupes.

L’ensemble des vaccins se répartit en 3 groupes selon qu’ils contiennent du virus entier, des protéines virales ou du matériel génétique. Leur objectif principal est de provoquer la production d’anticorps neutralisant la protéine S du SRAS-CoV-2 chez les sujets vaccinés contre la Covid-19 d’autant qu’il ne semble pas exister de neutralisation croisée entre le SRAS-CoV et le SRAS-CoV-2 (Ou 2020).

Classiquement les vaccins présentent des effets secondaires de type allergique au point d’injection, d’une symptomatologie d’état grippal. Des réactions allergiques graves et immédiates de type anaphylactique peuvent survenir en dehors des essais cliniques qui n’incluent pas les personnes présentant des antécédents allergiques graves.

Six cas d’accident anaphylactique pour 272 000 doses administrées ont été recensés aux États-Unis. Ils ont tous évolués favorablement.

En l’état des connaissances, les principaux avantages et inconvénients des différents types de vaccins contre la Covid-19 peuvent se résumer dans le tableau suivant :

Vaccins

Avantages

Inconvénients

Vaccins Viraux

  • Inactivé

Technologie éprouvée pour le SARS-CoV et d’autres viroses ;

peut associer des adjuvants (économie de particules virales) ; stable et facile à produire

Nécessite un adjuvant qui peut être mal toléré et des rappels pour le maintien de l’immunité

  • atténué

Stimule le système immunitaire inné par les récepteurs Toll-like 3 -7-8-9 qui concerne les cellules B et T (CD4, CD8)

Exige des contrôles approfondis d’innocuité et d’efficacité ; risque de recombinants post-vaccination pendant la réplication virale

  • à vectorisation virale

Forte réponse immunitaire par la haute spécificité des gènes introduits dans la cellule hôte ;

évite des manipulations de particules infectieuses ; stable physiquement et génétiquement

Réduction de l’efficacité du vaccin en cas d’immunité antérieure de l’hôte  vis-à-vis du virus vecteur ; risque oncogène par intégration inappropriée du génome viral dans celui de l’hôte

Vaccins protéiques

Dépourvus de tout composant vivant de particules virales ;

peu d’effets secondaires

Réponse immunitaire faible justifiant le recours à un adjuvant ;  l’effet mémoire pour des réponses à venir est discuté ;

risque de réponse immunitaire déséquilibrée

Vaccins génétiques

  • ARNm

L’introduction intracytosolique de l’ARN dans la cellule hôte évite tout risque d’intégration dans son génome.

Développement rapide et peu coûteux

Risque de survenue d’hyper réponses immunes ; instabilité (conservation en chaîne de froid) ;

les propriétés de l’ARN peuvent influencer sa distribution  cellulaire et tissulaire

  • à ADN

Stable (pas de chaîne de froid)

facile à préparer, en grande quantité ; évite toute manipulation de particules virales.

Les titres d’immunité sont faibles ; risque d’insertion délétère d’un ADN étranger dans le génome de la cellule hôte ; peut induire la production d’auto-anticorps.

 

  • les vaccins viraux 

Il est classique d’opposer les vaccins qui contiennent des agents infectieux de ceux qui n’en contiennent pas. La première catégorie remonte aux premiers vaccins d’Edward Jenner (variole 1796) et de Louis Pasteur (1885 anti-rabique). Selon le traitement chimique ou physique utilisé, le virus est inactivé (ne pouvant pas se reproduire) ou atténué (dans sa pathogénicité). L’inconvénient du virus inactivé est qu’il est peu immunogène et nécessite le recours à un adjuvant et à des injections répétées. Le vaccin à virus atténué fait appel à un virus vivant dont la forme mutante lui confère des propriétés (telles que la  thermosensibilité) réduisant sa capacité à se reproduire et son pouvoir infectant. Il est plus immunogène que le vaccin à virus inactivé avec l’inconvénient du risque de ne pas être suffisamment atténué pour des personnes fragiles, immunodéprimées, enceintes pour lesquelles il est déconseillé.

 

Vaccins à partir de Coronavirus inactivé ou atténué

Nom du vaccin/Société/pays

Traitement chimique

Phase de recherche

Commandes si autorisé

Sinopharm

Chine

Inactivé

Autorisé en début de

Phase 3 (juillet 2020)

(1M de vaccinés)

 

Corona Vac

Sinovac Biotech

Chine

Inactivé

Phase 3

Indonésie

(40M de doses)

Covaxin

Bharat Biotech

Inde

Inactivé

Phase 3

 

 

Institute of Medical Biology

Chine

 Inactivé

Phase 2

 

Chumakov Center

Russie

 Inactivé

Phase 1 + 2

 

En phase 1 : QazCovid (Kazakhstan) inactivé ; Schenzen Kangtai Biological products (Chine), inactivé ; Erciyes University (Turquie), inactivé ; Codagenix (US) , virus atténué ; Del-NS1-SARS-CoV-2-RBD (Hong Kong), virus atténué

Un autre type de vaccins issu de technologies plus récentes utilise des virus recombinants pour introduire des gènes codant pour la protéine S du SARS-CoV-2 aux cellules cibles et induire une réponse immunitaire efficace et durable. Ce virus a été rendu inopérant en substituant une partie de son matériel génétique responsable de sa virulence par une partie du matériel génétique de la protéine S du SARS-Cov-2. Il est ainsi devenu hybride par recombinaison génétique d’où le terme de virus recombinant. Le recours à une enzyme transcriptase inverse bien connue dans les rétrovirus dont le VIH, permet d’intégrer la séquence d’ARN d’intérêt du SARS-Cov-2 dans l’ADN du virus vecteur. Cette « version ADN » du SARS-Cov-2 après introduction vaccinale permet aux cellules infectées de retranscrire l’ARN et de le traduire en protéine S.

 

Vaccins à partir de virus transportant des gènes du coronavirus

Vaccin/Société/pays

Virus  vecteur recombinant 

Phase de recherche

Commandes si autorisé

Ad5-nCoV

Can Sino Bio

Chine

Adénovirus (Ad5) exprimant la protéine S

Phase 3  testée en Arabie Saoudite, Pakistan, Russie

 

Sputnik V

Gam-Covid-Vac

Russie

2 adénovirus

(Ad5 + Ad26)

Phase 3 + 4 Vaccination ciblée

Russie, E.A., Inde…

 

Johnson-Johnson

Israël

Ad26

 Phase 3

US : 100M doses

UE : 400M doses

ChAdOx1/Covishield

AstraZeneca

UK-Suède

Ad chimpanzé reproduit dans des lignées cellulaires humaines et exprimant une protéine S optimisée

Phase 2 + 3 selon 3 tranches d’âge dont 240 : > 69 ans

US : 300M doses

UE : 400M doses

En phase 1, plus de 10 candidats vaccins dont certains font appel à d’autres virus (modifiés) que l’adénovirus : virus de la rougeole (Merck-Institut Pasteur) – variole (MVA-SARS CoV2, Allemagne) – myxovirus influenzae (Wentai Biological Pharmacy, Chine) – virus de la stomatite vésiculaire VSV (Merck IAVI  US) (Brilife  Israël) ; parmi les vaccins à Ad5 en phase 1 : Grad-CoV2 de Reithera (Italie) – Vaxart (US) – Immunity Bio (US)

Il est habituel de classer les vecteurs viraux en 2 catégories selon qu’ils sont non réplicatifs (adénovirus d’humain ou de chimpanzé) dépourvus de la capacité à se reproduire dans la cellule infectée ou replicatifs (virus VSV de la stomatite vésiculeuse) infectant tour à tour d’autres cellules comme dans la maladie virale. Le virus VSV a déjà été utilisé par Merck contre le virus Ebola, après autorisations de la FDA et de l’EMA. Cependant, on comprend qu’il puisse être contre-indiqué notamment chez les immunodéprimés, dans la mesure où il pourrait favoriser des réponses immunitaires indésirables, auto-immunes et pire encore des réponses inflammatoires systémiques susceptibles d’être fatales.

Les adénovirus utilisés dans les vaccins à vectorisation virale sont responsables de symptômes légers (rhume, état grippal). Les résultats en termes d’efficacité ne sont aujourd’hui connus que pour le vaccin d’AstraZeneca, plus efficace dans le schéma d’une demi-dose suivie d’une dose complète (90%) que dans celui de 2 doses complètes à un mois d’intervalle (62%). Ceci s’explique par la fréquence  de l’infection (bénigne) à adénovirus chez l’humain qui a pu développer une immunité antérieure, diminuant l’effet vaccinal attendu contre le SARS-CoV-2. Ce qui a vraisemblablement conduit au principe retenu par le vaccin russe Sputnik V d’utiliser un adénovirus différent pour la 2e injection par rapport à la première.   

 

  • les vaccins protéiques

Le vaccin protéique ou plus précisément de sous unités protéiques fait appel à des peptides synthétiques ou à des protéines antigéniques recombinantes, fabriqués dans des cellules différentes de celles qui les fabriquent dans la vraie vie. Il ne comporte donc aucun composant vivant d’une particule virale, un avantage incontestable. La sous unité S1 (fragments antigéniques : NTD, RBD et RBM) et la sous unité S2 (fragments antigéniques : FP, HR1, HR2) de la protéine S sont les cibles de ce vaccin. Ce type de vaccins a déjà été réalisé contre le virus à ADN de l’hépatite B dont l’enveloppe contient également une protéine de surface. Il suffit de transférer (transgénèse) dans des cellules à forte capacité reproductive, la partie du matériel génétique qui détient le secret de fabrication de la protéine de surface et de faire en sorte qu’elle s’exprime correctement dans ces cellules (bactéries, levures, cellules végétales …) que l’on est capable de multiplier à grande échelle en laboratoire. La faible immunogénicité de la protéine vaccinante une fois purifiée, justifie l’adjonction complémentaire d’un adjuvant afin d’augmenter la réponse immunitaire induite par le vaccin.

 

Vaccins protéiques sans matériel génétique

Vaccin/Société/pays

Contenu protéique

Phase de recherche

Commandes si autorisé

NVX-Co2373

Novavax

US

Protéine recombinante S collées sur des nanoparticules

Adjuvant Matrix-M

Phase 3

US : 100M doses Australie : 40M doses

Medicago

Canada

Protéines végétales

transgéniques + adjuvant GSK

 Phase 3

Canada : 76M doses

Anhui Zhifei Longcom Chine

Segment RBD de la protéine spike Covid19 + adjuvant

Phase 3

 

Epivac Corona

Vector Institute

Russie

Peptides viraux Covid

Phase 1 + 2 + 3 ?

Approbation russe avant phase 3

 

Soberana 1

Finlay Vaccine Institut

Cuba

RBD de la protéine spike    +protéines de bactéries

+ adjuvant

Phase 1 + 2

US : 300M doses

UE : 400M doses

West China Hospital de Sichuan

Chine

Molécules issues de la transfection de cellules d’insectes par un virus encodé du segment RBD de la protéine S

Phase 2

 

Sanofi - GSK

France-UK

Protéine virale produite par les cellules d’insectes sur le modèle approuvé pour la grippe Flublok

+ adjuvant GSK

Phase 1 + 2

Phase 3 décalée

US : 100M doses

UE : 300M doses

Canada : 72M doses

Covax : 200M doses

Spybiotech d’Oxford

UK

Assemblage de protéines de virus hépatite B et protéines spike de Corona virus

 

Phase 1 + 2

 

 

Baylor médecine + Texas Child.Hospital

US

Combinaison de protéines de Coronavirus

+ adjuvant Dynavax

 

Phase 1 + 2

 

 

En phase1 : pas moins de 10 vaccins sont recensés et répartis sur tous les continents : US, Cuba, Australie, Allemagne, France (institut Pasteur), Royaume-Uni, Taiwan, Corée du Sud. Un essai préclinique pour un patch transdermique du vaccin recombinant MNA-SARS-CoV-2 est en cours à Pittsburgh (US).

 

  • les vaccins génétiques

il s’agit de vaccins à acides nucléiques, ARN ou ADN qui bénéficient de recherches depuis 2 décennies. Aucun vaccin à ARN n’a été antérieurement homologué même si certains ont été testés chez l’humain contre le virus de la rage, de la grippe, le virus Zika et le cytomégalovirus. Certains vaccins à ADN sont déjà autorisés en milieu vétérinaire.

 

Vaccins à ARNm

L’ARN messager synthétique contient la protéine d’intérêt (protéine S du SARS-CoV-2) et des protéines non structurales utiles pour sa traduction par la machinerie intracellulaire. Dans certains vaccins, l’ARNm est flanqué, à une de ses extrémités (5’UTR), d’une seconde structure, une réplicase pour amplifier de façon indépendante la production d’ARNm.

Il est produit in vitro à partir d’une molécule d’ADN circulaire, ADN plasmidique, linéarisée à partir de laquelle le brin d’ARN messager synthétique sera copié, transcrit en présence de nucléotides et d’une enzyme (ARN polymérase).

Il y a donc 2 types de construction possible dans un vaccin à ARN : l’ARN messager conventionnel (NRM : non-replicating messenger) et l’ARN messager auto-répliquant (SAM : self-amplifying messenger). Même si tous les mécanismes d’action ne sont pas encore connus, il semble qu’une grande variété de cellules est capable d’intégrer ces ARNm et, comme dans la virose Covid-19, de les traduire en protéines dans le cytoplasme puis de les présenter aux cellules du système immunitaire (CMH).

L’injection vaccinale entraîne dans nos cellules, la production naturelle de la protéine S selon sa conformation (forme) habituelle.

Contrairement aux vaccins à virus inactivés et aux vaccins à protéine recombinante qui induisent essentiellement une réponse immunitaire d’anticorps, les vaccins à ARNm stimulent aussi bien l’immunité à médiation cellulaire (lymphocytes T CD4+ et CD8+) que l’immunité humorale (lymphocytes B avec production d’anticorps anti-protéine S). De plus, l’ARNm peut déclencher l’immunité innée : ici les cellules présentatrices d’antigènes (CPA : cellules dendritiques, monocytes et lymphocytes B) expriment des récepteurs Toll-like, en particulier le TLR7 (fig1). En reconnaissant dans la cellule l’ARN simple brin, le TLR7 induit la sécrétion de cytokines par ces cellules qui, en même temps activent les lymphocytes T via leur propre TLR7 (fig 1). C’est donc bien l’ARNm lui-même (et non la protéine antigénique) qui active l’immunité innée et sa capacité d’amplifier la réponse immunitaire. On comprend que le vaccin à ARNm n’a vraiment pas besoin d’adjuvant pour augmenter sa réponse immunitaire.

 L’ARNm vaccinal est stabilisé par des polymères cationiques de charge électrique inverse de celle de l’ARN. Il est encapsulé dans une bulle liposomique, de la taille d’une nanoparticule le protégeant des ribonucléases circulantes et tissulaires tout en favorisant sa pénétration intracellulaire par fusion de la capsule vaccinale avec la membrane cellulaire (qui contient également des graisses). Les nanoparticules lipidiques contiennent du polyéthylène glycol (PEG), couramment utilisé en médecine. Elles peuvent entraîner des réactions allergiques de type anaphylactique en cas d’anticorps anti PEG préexistants dans l’organisme.

L’innovation du vaccin synthétique à ARNm permet une production accélérée, peu coûteuse d’un produit remarquable par sa pureté après élimination de certains ARN contaminants lors de leur production in vitro à partir d’un ADN plasmidique linéarisé. Il n’agit que quand il a pénétré la cellule contrairement aux vaccins à ADN. La double activation de l’immunité adaptative et de l’immunité innée justifie un recul scientifique suffisant en termes d’hyper-réponse immunitaire vaccinale.

Cependant, avant qu’il ne pénètre dans la cellule après injection intramusculaire, le vaccin est exposé à un risque de dégradation rapide, renforcée par la production d’interférons activés par les TLR7 puisque ces derniers hyperactivent des enzymes qui le découpent : les ribonucléases. Un autre inconvénient est sa fragilité qui exige une conservation en chaîne de froid (-70°C) et par elle une logistique qui n’est pas applicable partout.

La Covid-19 est à l’origine du premier vaccin à ARN, utilisé chez l’humain.

Aujourd’hui l’attente est forte de connaître à travers des publications scientifiques de référence, la réponse immunitaire induite : sa nature, sa durée, ses variations selon le contexte clinique et immunitaire, notamment des groupes à risque.

Vaccins génétiques à ARN messager

Nom du vaccin/Société/pays

Matériel ARN/codon

Phase de recherche

Commandes si autorisé

ARNm-1273

Moderna-NIH

Boston US

ARNm (25mcg)

Protéine S complète

Conservation  – 20°C

Autorisé US (FDA)

UE (6/01/2021 ?)

adultes les

enfants 12-18 ans

US : 100M doses

UE : 160M doses

Canada , Japon, Qatar : ?

BNT162b2

Pfizer - BioNtech

US - Allemagne

ARNm

Fraction RBD

Conservation  – 70°C

Autorisations

US (FDA) - UE (EMA)

Adultes  < et > 65 ans

enfants 12-18 ans

US : 100 puis 500M doses

UE : 200M doses

UK : ?

Japon : 120M doses

CVnCoV

CureVac

Allemagne

ARNm

Conserv.  3mois 4°C

Phase 2+3

UE : 225M doses

Imperial College of London

UK

 

ARNm avec réplicase

(auto-amplificateur)

Phase 1 + 2

 

Acturus therapics (US)

+ Duke-NUS Med School (Singapour)

ARNm avec réplicase

(auto-amplificateur)

Phase 1 + 2

Singapour : 175M $ de vaccins

En phase1 : le vaccin à ARN appelé ARCoV (chine) et le vaccin ChulaCov19 (Thaîlande)

En phase préclinique : le laboratoire français Sanofi développe son second vaccin en partenariat avec Translate BIO.

 

Les premiers résultats rendus publics de deux essais cliniques en phase 3, randomisés en double aveugle avec un groupe placebo concernent les deux vaccins américains autorisés de Pfizer-BioNtech (près de 43 000 participants) et de Moderna-NIH (près de 30 000 participants). Ils objectivent une efficacité de 94 % avec pour le premier, 8 cas de Covid-19 symptomatique dans le groupe vacciné versus 162 dans le groupe placebo et pour le second 11 cas vs 185.

La majorité des effets secondaires sont classiques, locaux au point d’injection et généraux à type d’état grippal. Ces derniers sont fréquents dans les 2 études : 59 % des vaccinés versus 23 % du groupe placebo dans la première étude et 65 % vs 23 % dans la seconde. La survenue d’adénopathie(s) axillaire(s) est moins importante pour les volontaires vaccinés dans l’essai clinique de Pfizer-BioNtech (0,3%) que dans l’essai de Moderna-NIH (1,1%). La fréquence d’événements indésirables graves est identique entre les groupes vaccinés et placebo des 2 essais cliniques. Plusieurs cas de paralysie faciale ont été rapportés par le comité vaccin de la FDA dans les 2 études : 4 cas dans le groupe vacciné versus zéro dans le groupe placebo pour l’étude de Pfizer-BioNtech - 3 cas dans le groupe vacciné versus un cas dans le groupe placebo. Bien que ces chiffres ne semblent pas éloignés de ceux de la population générale (0,015 à 0,0 ou 3 %), la FDA recommande le suivi de la survenue éventuelle de paralysies faciales « a frigore » dans la campagne de vaccination de phase 4, sage précaution dans la mesure où cette pathologie a déjà été associée à un taux élevé d’interféron.

L’hypothèse d’une éventuelle génotoxicité par intégration de l’ARN dans l’ADN du noyau de la cellule hôte suppose que cette même cellule dispose des enzymes transcriptase inverse et intégrase puisque le vaccin ne contient pas lui-même ces enzymes indispensables. De plus, aucune séquence « fossile » de rétrovirus endogène ne peut induire la production de transcriptase inverse ni d’intégrase indispensables à l’insertion de l’ARN dans le génome nucléaire de la cellule.

Les ARNm qu’il soient conventionnels ou auto-amplificateurs ne peuvent donc pas, a priori, modifier le génome de la cellule. Est-il besoin de rappeler que ce type de vaccination n’est en aucun cas une thérapie génique substituant la fonction d’un gène sain à celle d’un gène défectueux...

Aucune manifestation liée au risque théorique d’une hyper-réponse inflammatoire voire auto-immune n’a été à ce jour publiée, à plus de 2 mois de la 2e dose vaccinale. Un recul plus important s’impose pour indiquer ce vaccin dans le cadre de maladies auto-immunes instables  (exclues de la phase 3)

 

Vaccin à ADN

Il s’agit d’un vaccin contenant un ADN qui code pour une séquence de la protéine S du SARS-CoV-2  et un adjuvant pour induire la réponse immunitaire adaptative.

La pénétration cellulaire du fragment d’ADN conduit à sa transcription en un fragment d’ARN capable de lancer la production de la protéine Spike spécifique qui, une fois reconnue par le système immunitaire, déclenchera par ce dernier l’immunité adaptative cellulaire et la production d’anticorps neutralisant le virus.

Ce qui différencie le vaccin à ADN du vaccin à ARN, c’est sa stabilité (pas de conservation en chaîne de froid) et sa capacité de production de la protéine antigénique. En revanche, le risque d’une insertion délétère d’ADN étranger dans l’ADN du génome de la cellule hôte ne peut être formellement exclue que dans le vaccin à ARN. De même le vaccin à ADN peut favoriser la production inappropriée d’auto-anticorps.

Le tableau qui suit montre un décalage dans l’avancée des phases de recherche par rapport à celles de l’ARN messager.

Vaccins génétiques à ADN

Vaccin/Société/pays

Matériel ADN / voie

Phase de recherche

Commandes si autorisé

Zydus Cadila

Suisse

ADN

patch dermique

Phase 2

et phase 3  prévue en décembre 2020

 

AnGes

Japon

ADN

Phase 2

et phase 3  prévue en décembre 2020

 

Inovio

US

ADN

intradermique

Phase 2 / 3

 

Genexine

Corée

ADN

Phase 2

 

 

En phase1 : le vaccin à ADN (gène nucleocapsidique) appelé Covigenix VAX-001 (Entos - Canada) -  le vaccin de la société Symvivo (Canada) dont l’ADN est inséré dans une bactérie inoffensive de la cible intestinale pour sécréter les protéines virales - la firme américaine Oncosec Immunotherapies développe le vaccin  CORVax12 en adaptant leur technologie éprouvée en immunothérapie oncologique qui incorpore des gènes produisant une molécule IL-12 (interleukine 12). L’ADN code à la fois pour la protéine Spike et l’IL-12 afin d’augmenter les capacités immunitaires à fabriquer des anticorps contre la protéine Spike.

En phase préclinique, l’institut Pasteur annonce comme 3e vaccin, un vaccin ADN.

 

La vaccination et ses stratégies

  • les bases immunitaires

La pandémie de la covid-19 a permis de spectaculaires avancées de la connaissance des mécanismes immunitaires de la physiopathologie de la virose et des cibles thérapeutiques et vaccinales, de plus en plus précises.

Ils sont résumés à la figure 1 à propos de la réponse immunitaire naturelle et vaccinale de la Covid-19.

 

  • Immunité vaccinale et principe de précaution

Selon l’OMS, le vaccin doit fournir un rapport bénéfice/risque très favorable, avec une efficacité élevée, seulement des effets indésirables légers ou transitoires et aucune maladie grave.

La survenue de mutations pourrait impacter (comme dans la grippe) l’efficacité vaccinale. Elle suppose non pas des dérives antigéniques (mutations ponctuelles) mais de profonds changements antigéniques peu ou non reconnus par l’immunité vaccinale en place, modifiant la conformation de la protéine Spike (spicule), véritable clé du SARS-Cov2 pour la serrure membranaire « ACE2 » de la cellule hôte. Ce qui ne semble pas être aujourd’hui le cas depuis plus d’une année. Une surveillance à l’échelle internationale (et nationale) de telles mutations ainsi que de la recrudescence saisonnière de coronavirus pourrait modifier la stratégie vaccinale voire le vaccin lui-même. Il ne semble pas que le récent variant anglais à plus forte contagiosité soit concerné. La question se pose aujourd’hui pour un nouveau variant sud-africain ayant gagné l’Europe. Quoiqu’il en soit, si une mutation peut remettre en cause le recours à un vaccin devenu inopérant, elle ne peut en aucun cas porter atteinte aux fondements éthiques de la vaccination.

Enfin pour être complet, l’improbable pénétration concomitante dans une même cellule de matériel génétique vaccinal et de matériel génétique d’un virus infectant de même nature (ARN ou ADN), soulève l’hypothèse d’un virus recombinant encore plus improbable à l’échelle d’une vaccination individuelle. La recombinaison virale pourrait cependant présenter à l’échelle mondiale (plusieurs milliards de vaccinés) le risque de l’émergence quelque part d’un virus qui pourrait être particulièrement dévastateur comme en témoigne celle du SARS-CoV-2 et comme ce fut le cas du virus H1N1 (triple recombinant des virus de la grippe aviaire, porcine et humaine) fort heureusement devenu inoffensif suite à cette mutagenèse. C’est dire l’imprévisibilité du pouvoir pathogène d’un virus muté ou recombinant. Une telle hypothèse de survenue aussi rarissime qu’elle puisse être dans la gravité de ses conséquences pandémiques, est-elle suffisante pour donner la préférence dans un premier temps aux vaccins classiques (viraux et protéiques) par rapport aux vaccins génétiques ou à vectorisation virale, au nom d’un principe de précaution poussé à l’extrême et en tout cas non retenu dans le reste du monde. Rien n’est moins sûr. Dans le contexte actuel de la pandémie Covid-19, la disponibilité vaccinale concerne essentiellement deux vaccins à ARNm dont la plus grande facilité de production laisse entrevoir aussi une réactivité plus performante de la stratégie vaccinale.

Ce débat renforce l’intérêt de la recherche sur les traitements immunitaires de la Covid-19 tels que l’immunité passive aujourd’hui par l’injection d’anticorps contenus dans le plasma de convalescent à récupération rapide de la Covid-19 (Chen 2020 - Duan 2020 - Hegerova 2020 – Joyner 2020 – Li 2020 – Zhang 2020), demain d’anticorps monoclonaux ciblant l’immunopathologie induite par les cytokines (Tay 2020) , par exemple un anti-récepteur IL-6R@ de la membrane des cellules dendritiques (générant des cellules pathogènes en aval de la tempête de cytokines) (Kang 2019)

 

  • les priorités vaccinales

Elles renvoient à la problématique soulevée par la pénurie de masques lors de la première poussée épidémique. En effet, la disponibilité de doses vaccinales ne permet pas de couvrir l’ensemble de la population. Il va de soi qu’une priorité concerne les soignants les plus exposés qu’ils soient de proximité ou en milieu hospitalier. De même il concerne les personnes les plus exposées au risque de mortalité et d’hospitalisation en cas de contamination par le SARS-CoV-2.

Au terme des premières phases prioritaires de la campagne de vaccination, s’il est démontré que la vaccination Covid-19 est efficace contre la circulation du virus (en plus de l’infection virale), l’objectif sera d’atteindre le seuil de couverture vaccinale pour l’immunité de groupe susceptible d’interrompre la pandémie et de protéger de façon indirecte, les personnes pour lesquelles la vaccination est déconseillée voire contre-indiquée.

 

  • le cas particulier des personnes âgées

La vulnérabilité de la personne âgée est variable selon son niveau de fragilité, son statut immunitaire, ses éventuelles comorbidités mais aussi ses conditions de vie, son environnement social (habitat, EHPAD) et économique (précarité, ressources). La présentation clinique de la Covid-19 pour les personnes les plus âgées est souvent atypique : peu symptomatique, trompeuse par la polymédicamentation, peu communicante du fait de souffrances d’isolement et, en cas de séjour prolongé dans un service Covid-19, d’un manque de culture gériatrique avec le risque d’accès limité aux soins, d’une nutrition inadéquate, d’un retard pris après la phase aiguë sur la récupération motrice et musculaire.

L’impact de la sénescence sur le système immunitaire (respiratoire et autres organes vitaux) justifie que la vulnérabilité de la personne âgée soit considérée comme une entité à part, évaluée au cas par cas dans la prise en charge de la Covid-19. De nombreuses études ont suggéré que les cellules sénescentes peuvent également contourner les réponses immunitaires innées et adaptativesLes cellules sénescentes développent un phénotype sécrétoire associé à la sénescence (SASP : senescent-associated secreted phenotype) par lequel sont sécrétées des cytokines et des chimiokines pro-inflammatoires. Comme l’indique la fig. 2, l’immunosénescence peut aggraver l’immunopathologie de la Covid-19.

De tels changements dans la compétence immunitaire avec une prévalence inflammatoire plus élevée peut expliquer une tendance accrue à l’orage cytokinique, source de fibrose pulmonaire et de détresse respiratoire ainsi que d’hyper coagulation vasculaire disséminée (Huang 2020) et par lui, un taux singulièrement élevé de létalité de la Covid-19 (Salje 2020). De même, un stimulant immunitaire fort peut, chez les plus vulnérables touchés par la multi-morbidité, submerger le système immunitaire par exemple lors de la tempête de cytokines du syndrome aigu de détresse respiratoire de la Covid-19. Le plus souvent, l’immunosénescence diminue la réponse immunitaire et sa symptomatologie clinique ainsi que la protection vaccinale comme des études ont déjà pu le démontrer pour la grippe.

Fig.2 : Immunopathologie de la Covid-19 et Immunosénescence

En échappant à la surveillance immunitaire, l’élimination des cellules sénescentes (par autophagie) issues d’un traitement clinique ou d’un cumul dans les tissus âgés peut être entravée et déséquilibrer le rapport entre le dommage tissulaire et sa réparation (résilience). De plus, les cellules sénescentes résistent à l’apoptose (mort cellulaire programmée) source de régénération cellulaire. Ce mécanisme est en cause dans la dégénérescence des tissus et dans les maladies dégénératives liées à l’âge. C’est tout l’intérêt de développer au plus vite des stratégies sénolytiques pour les personnes de plus de 65 ans dont la croissance démographique est sans précédent. Une des stratégies les plus prometteuses est d’empêcher les cellules sénescentes de libérer des facteurs associés au SASP en cause dans les maladies liées à l’âge et dans le cancer.

Si l’attente de sauts technologiques est forte aujourd’hui de disposer de bio-marqueurs de sénescence précis, fiables et non invasifs, le dépistage clinique aidé de la médecine digitale et de l’intelligence artificielle est déjà un apport incontestable (Tavassoli 2020 – Takeda 2020).

Tels sont les enjeux de la géroscience dont l’objectif est de déterminer les mécanismes du vieillissement biologique impactant la comorbidité afin d’identifier les cibles moléculaires et cellulaires pour des applications thérapeutiques adaptées, curatives et préventives comme les vaccins.

 

Les principes éthiques en jeu

Ils reposent sur l’information objective de la connaissance évolutive du virus, des mécanismes de son pouvoir pathogène, des technologies aussi bien médicamenteuses que vaccinales (désignées sous le nom de plate-formes). L’évolution sans précédent de l’innovation et de la recherche en matière vaccinale depuis janvier 2020 met en perspective une solution vaccinale susceptible en quelques mois de lever les mesures en place de protection, coercitives (confinement, couvre-feu), sources de précarités sociale et économique, gravement attentatoires à la santé. Cette accélération est porteuse d’espoir pour lequel quelques données encore font l’objet d’une attente forte au regard des études en phase 4 : efficacité contre la transmission du virus, durée de protection individuelle, effets secondaires à distance. L’exigence d’une information transparente, complète et compréhensible est le garant d’une stratégie vaccinale librement consentie sur les bénéfices attendus et les risques encourus (principe d’autonomie).

L’immunité de groupe repose sur le principe de solidarité pour la protection d’autrui. Elle fait suite, en cas de pénurie de vaccins, à la priorité vaccinale, toujours proposée, au nom de la primauté de la personne la plus exposée des soignants (médicaux, paramédicaux et de première nécessité) et la plus vulnérable des soignés et de ceux susceptibles de l’être. L’immunité de groupe inclut l’immunité naturelle apportée par la Covid-19 et dépend comme elle de la performance des tests immunitaires concernés. Elle inclut également l’immunité passive induite par l’injection d’anticorps spécifiques notamment de convalescents, non seulement à visée curative mais aussi à visée préventive comme solution d’attente vaccinale. Autant d’avancées dont l’attente est forte.

L’obligation vaccinale va à l’encontre dans une démocratie, du principe du consentement libre et éclairé aux soins de la personne. Seule une mise en danger d’autrui d’une particulière gravité dans le cadre de la pandémie Covid-19 pourrait y déroger en dehors d’une contre-indication vaccinale avérée. Elle relèverait alors d’une décision du législateur comme le sont les vaccinations obligatoires des enfants et de certaines professions à risque pour elles-mêmes et/ou pour autrui (santé, laboratoires, alimentation, protection civile et militaire). L’obligation vaccinale n’est donc pas à ce jour raisonnable, ni justifiée ni souhaitable. Elle pourrait même être contre-productive en accentuant la défiance face à un comportement portant atteinte à l’autonomie décisionnelle.

La vulnérabilité, contrairement au handicap séquellaire d’une pathologie antérieure, résulte de risques encourus par une personne dans une situation donnée. Elle concerne les plus fragiles selon l’âge et l’état de santé, les plus pauvres, les plus isolés dans notre société. La sélection de critères de soins en fonction de l’âge chronologique, du sexe, du contexte social, d’un handicap est éthiquement inacceptable, comme le souligne par exemple la société européenne de médecine gériatrique (www.eugms.org).

Les fondements d’un débat public sur la pandémie Covid-19 exigent une réflexion préalable sur la possible mise en cause d’un certain nombre de libertés.

La liberté d’expression peut être dévoyée par la communication « de spécialistes en tous genres » sur des informations non contrôlées, source de peur et de défiance envers la gouvernance de la pandémie. Il en est de même de la liberté de l’exercice de la médecine où peuvent se confondre de façon inappropriée médecine de soins et médecine de santé publique dans le silence parfois incompris d’institutions concernées (ordinales, académiques et professionnelles) ainsi que, pour certains, celui d’instances de veille constitutionnelle sur l’état d’urgence.

La liberté de la recherche comme celle du conseil scientifique soulève la question des liens d’intérêt et des conflits d’intérêts dont la limite souvent floue peut constituer une entrave au discernement dans la réflexion éthique. À ce titre, l’effort de la recherche doit porter autant sur les traitements antiviraux de la Covid-19 que sur sa vaccination.

Le respect des libertés publiques et individuelles peut être mis en tension éthique par l’injonction de dispositions de santé publique liées au statut vaccinal de la personne (passeport vaccinal, traçabilité numérique détournée),  dont les conséquences pourraient porter atteinte de façon stigmatisante et discriminatoire à la protection des données personnelles, de la vie privée, jusqu’à l’égalité d’accès aux services publics et privés issus des missions régaliennes de l’État de droit (santé, éducation, protection civile).

L’accessibilité à la vérité scientifique et aux moyens d’évaluer le bien collectif (bienfaisance) au regard du risque individuel (non malfaisance) est une condition préalable au débat public s’il doit être considéré comme un outil de la gouvernance dans une démocratie participative.

 

  • la gouvernance de la campagne vaccinale

Nous avons récemment synthétisé les aspects éthiques de la gouvernance de la crise pandémique pour laquelle nous retenons la gestion simultanée de la protection de la personne, des libertés individuelles et des ressources nécessaires (tableau éthique et gouvernance de crise type Covid-19 du 19 novembre 2020).

La campagne vaccinale, sous l’autorité de chaque État, relève d’une logistique nationale de santé publique coordonnant l’indication du vaccin sous la responsabilité d’un médecin, la vaccination à grande échelle par les soignants de proximité et le suivi de la personne vaccinée (du court au long terme) et par elle de chaque lot vaccinal.

Une information régulière et transparente sur l’efficacité et les effets indésirables des vaccins utilisés nécessite une analyse et d’une interprétation des données par des organismes scientifiques compétents, un gage de confiance citoyenne. Les données utiles au suivi épidémiologique de la vaccination doivent être anonymisées, celles utiles à la santé du vacciné doivent être protégées et conservées dans le respect des dispositions réglementaires sur la protection des données et le secret médical.

En traçant légitimement le virus puis son vaccin, une application mobile de suivi épidémiologique ne doit pas tracer illégitimement la personne humaine selon son statut vaccinal. De même, la prédictivité par l’algorithme ne peut être autonome dans la prise de décision de mesures de précaution individualisées dont la veille éthique doit pouvoir s’assurer qu’elles ne soient pas, de façon disproportionnée, liberticides et discriminatoires (Réflexion éthique sur le suivi épidémiologique du déconfinement de l’épidémie Covid-19).

Depuis la création de la sécurité sociale, l’attitude sécuritaire à laquelle nous sommes tant attachés, est aussi de considérer que les modèles de santé publique les plus séduisants ont leur propre imperfection sur le terrain, à l’échelle des moyens humains et matériels. À cet effet, la campagne vaccinale pas moins que la prise en charge de la Covid-19 n’échappe au respect de la nécessaire complémentarité des compétences et des responsabilités de chacun.

L’équité d’accès aux vaccins s’impose à la gouvernance au nom des principes de justice sociale, d’égalité d’accès aux soins et de non-discrimination tant au niveau de la première étape de priorisation des groupes de personnes à risque dont le but est de sauver des vies qu’au niveau de la vaccination de masse afin de protéger l’ensemble de la population par une immunité de groupe. L’égalité d’accès aux soins curatifs et préventifs est un des fondements d’une politique de santé sécuritaire

La gestion équitable des vaccins dont la stratégie doit être bien comprise par l’opinion publique, ne peut que renforcer la confiance du citoyen et lutter contre la désinformation, source de doutes et de réticences. L’efficacité de la distribution des vaccins, l’égalité de prise en charge au sein d’un même groupe (délai de la vaccination, gratuité, indemnisation de préjudices éventuels) sont les clés de la réussite de la stratégie vaccinale au plan national.

L’égalité d’accès aux vaccins s’inscrit également sur un plan international dans la notion que la santé est un bien commun universel, au même titre que la nutrition et l’éducation. La vaccination doit être accessible aux populations les plus pauvres. Elle passe par une volonté politique forte au plus haut niveau mondial (ONU : OMS, OMC mais aussi dirigeants politiques), pour mobiliser des fonds afin de réduire la crise économique des pays émergents les plus touchés, pour soutenir et créer des O.N.G. réactives et des outils efficaces de lutte contre la pandémie Covid-19 (https://www.who.int/fr/initiatives/act-accelerator:covax), avec la contribution commerciale de l’industrie du vaccin, consciente de l’exigence morale de solidarité contre la pire des injustices que serait en 2021 l’inégalité « Nord–sud » d’accès à la vaccination anti Covid-19.

 

Conclusion

La première année de la pandémie Covid-19 en bouleversant douloureusement notre vie quotidienne a modifié nombre d’équilibres dans notre corps social priorisant la santé sur l’économie et l’éducation, le bien collectif sur la liberté individuelle, l’isolement sur le lien social, le pouvoir exécutif sur le législatif, la communication d’une multitude d’experts en tous genres sur l’information scientifique de référence. Comme vous le savez, cette énumération n’est pas exhaustive. La réflexion éthique basée sur un certain nombre de principes fondateurs des droits de l’homme nous aide à mieux discerner les choix et les enjeux de l’expérience de vie que nous soumet la pandémie Covid-19.  L’arrivée des vaccins dans un délai inhabituellement court avec des sauts technologiques ouvrant la voie hybride de « vaccins curatifs » relance le débat éthique sur l’innovation mais aussi sur le sens que nous donnerons à l’après Covid.

Dernière modification le 12 mars 2024 3:21

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